Du salon de Genève de 1995, il y a 26 ans, je me souviens ! Comme souvent, le plateau des nouveautés de cette édition était varié. Plusieurs modèles présentés marquaient le retour en force d’une carrosserie tombée peu à peu dans l’oubli : les roadsters.
Pour commencer simplement, un roadster est une voiture découvrable c’est-à-dire que son toit peut être retiré. Mais alors, c’est un cabriolet (convertible en anglais), eh bien non. Même si le cabriolet est aussi une voiture découvrable, il ne s’agit pas du même type de carrosserie.
Un roadster est une voiture plutôt sportive et légère. Il peut dériver d’un coupé existant. Mais il existe aussi certains coupés issus d’un roadster (BMW Z3 et Z4 ou MG B par exemple). Sa hauteur est en général inférieure à 130 cm. Son nombre de place est limité à deux bien que nous trouvons parfois des modèles avec un ou deux strapontins ou sièges d’appoint arrière faisant de la voiture une 2+2. Les panneaux latéraux de la voiture peuvent être fixes ou amovibles (en toile ou plastique). Le pare-brise a une faible hauteur et peut être rabattable sur le capot ou amovible voire absent. Le toit amovible peut être inexistant ou bien être une capote souple ou un hard-top ou enfin être rigide et rétractable électriquement.
A contrario, un cabriolet est souvent dérivé d’une berline (bicorps ou tricorps). Parfois, il peut être issu d’un coupé (Porsche 911) ou d’un crossover (Nissan Murano). Vous comprendrez donc qu’un cabriolet peut être sportif ou pas. Son pare-brise et ses panneaux latéraux sont fixes. Enfin, il conviendrait plutôt de dire qu’ils sont rigides parce que les portes s’ouvrent et les vitres descendent et remontent. Le nombre de place est de quatre mais aussi plus rarement de deux ou 2+2. Un cabriolet ne comporte généralement que deux portes mais il en existe avec quatre portes. Je me demande si des cabriolets à six portes n’ont pas été créés par certains carrossiers. Si quelqu’un a des informations sur ce point, il ne faut pas hésiter à les partager.
Une confusion peut naître en raison des appellations commerciales des différents modèles. Ainsi un roadster peut être désigné comme un spider, un spyder, un speedster voire même un cabriolet (Chevrolet Corvette). De même il existe des cabriolets ayant une appellation commerciale de spyder (Maserati Biturbo).
Depuis les débuts de l’automobile, la carrosserie roadster était présente chez de nombreux constructeurs. Les plus actifs dans ce domaine étaient les marques anglaises. Elles produisirent la plupart des roadsters d’avant-guerre. Parmi elles, Morgan en fabrique de manière continue depuis 1910.
Le roadster est une des carrosseries de voiture qui protège le moins des intempéries. Et pourtant, la plupart proviennent d’une contrée où le soleil ne brille pas si souvent et où la pluie est régulièrement au rendez-vous. C’est un élément qui pousse à reconnaître que les anglais sont vraiment passionnés par l’automobile.
Après la seconde guerre mondiale, les principaux roadsters sont anglais (MG, Jaguar, Triumph). Ils occupent tous les segments de marché : de la petite voiture économique à la voiture de luxe. Une partie de la relance de l’industrie automobile britannique passe même par là. Si des véhicules utilitaires pour le transport des personnes et des marchandises sont nécessaires pour la reconstruction, il faut aussi fabriquer des voitures plaisantes à conduire pour les exporter vers les richissimes États-Unis de l’époque, et faire rentrer des devises.
L’industrie naissante des kit-cars s’engouffre dans la production de roadsters en raison de leur simplicité et de leur côté ludique. Je précise que les kit-cars sont des voitures à assembler soi-même avec une carrosserie en matière synthétique sur un châssis tubulaire et qui utilise des mécaniques des grands constructeurs, et parfois même la plate-forme entière d’un modèle existant (Volkswagen Coccinelle par exemple). Les fabricants de kit-cars sont de petits constructeurs artisanaux pour la plupart britanniques et américains. Lotus produisit des kit-cars avant de produire des voitures complètes.
Les constructeurs allemands (Porsche 356 Speedster, Mercedes-Benz 190SL, Volkswagen Karmann Ghia,) et italiens (Alfa Romeo Spider, Fiat Spider) comprennent le filon et s’y engage au milieu des années 1950. Les américains répliquent avec les Chevrolet Corvette et Ford Thunderbird. Au cours des années 1960, les japonais se lancent à leur tour dans la production de roadster avec la Datsun Fairlady et les Honda S600 et S800.
Et les français ? Ils sont tristement à la traîne. Les seuls roadsters français présents sur le marché dans les années 1950 sont produits pour la plupart par des artisans en petite série. Alpine est de ceux-ci avec son cabriolet dérivé du coupé berlinette, cabriolet qui est en fait un roadster parce que sportif, léger, de faible hauteur et à deux places. La seule exception parmi les grands constructeurs français est Panhard. Il produisit le roadster Junior entre 1952 et 1956 mais sans rencontrer le succès.
La plupart des roadsters ainsi que des cabriolets disparaissent au cours des années 1970 et au début des années 1980. La principale raison est les normes de sécurité de plus en plus poussées aux États-Unis mais aussi en Europe. Tous les grands constructeurs anglais abandonnent leur roadster. Au milieu des années 1980, il ne subsiste plus que deux roadsters sur le marché mondial parmi les grands constructeurs. Il s’agit des Alfa Romeo Spider lancée en 1966 et Mercedes-Benz SL lancée en 1971. Les petits constructeurs britanniques (Caterham, Morgan, TVR) et les artisans fabriquant de kit-cars restent présents également.
Pourtant le désir de voitures légères, sportives et ludiques est toujours là. Le succès des GTI le démontre. De même, les cabriolets reviennent dans les gammes. Ce sont pour la plupart des dérivés de berlines avec un arceau. Les carrosseries à toit targa rencontre aussi un certain succès.
Deux roadsters réapparaissent en 1986 : la Cadillac Allanté et la Chevrolet Corvette. Les constructeurs allemands présentent à leur tour deux roadsters au salon de Francfort 1987 : la BMW Z1 et la Porsche 911 Speedster.
L’électrochoc arrive au mois de février 1989. Mazda présente alors la MX-5 Miata au salon de Chicago. Ce modèle est la réincarnation moderne du roadster des années 1950 et 1960. Nous pouvons féliciter les japonais de Mazda pour ce lancement. Les constructeurs japonais sont de très bons commerçants. Ils sont aussi habités par une passion de l’automobile qui s’est souvent traduit par des modèles forts sympathiques au cours de leurs histoires.
Au salon de Genève de la même année, Mercedes-Benz renouvelle son roadster SL après 18 ans. C’est aussi un évènement à l’autre bout du marché avec un modèle ayant une profusion d’équipements électriques et électroniques.
Ford veut revenir aussi sur le marché des roadsters. La filiale australienne de la marque présente la Capri en juillet 1989. Cette voiture repose sur une plate-forme de Mazda 323. C’est donc une traction avant. Devant le succès de Mazda en Amérique du Nord, la Ford Capri australienne est exportée sous le label de Mercury Capri. Pourtant les ventes sont plutôt faibles. La production est arrêtée en mai 1994. Il est ironique de voir Ford, partenaire de Mazda, affrontant Mazda sur le segment des roadsters avec un modèle reposant sur une base Mazda.
En novembre 1989, Lotus riposte en commercialisant l’Elan. Lotus est alors propriété de la General Motors. L’avantage réside dans la force de frappe mondiale d’un tel groupe. L’inconvénient est le manque de liberté et de cohérence. Un roadster est une voiture d’image. La nouvelle Elan est une traction avant avec un moteur Isuzu, ce-dernier appartenant alors aussi à GM. C’est un échec. Comme pour Ford avec la Capri, de gros moyens ne sont pas forcément garant du succès. La voiture est retirée du marché en juillet 1992. Elle reviendra en version S2 entre juin 1994 et septembre 1995 suite au rachat de Lotus par Bugatti.
MG réagit aussi rapidement en proposant un nouveau modèle dès le salon de Birmingham au mois d’octobre 1992. Il s’agit de la RV8 qui est une reprise de la MGB. L’initiative est originale et sympathique. Elle permet d’occuper le terrain.
Six années sont nécessaires pour riposter à l’offensive de Mazda dont les ventes de la MX-5 se portent bien. À la fin de 1994, 341 430 exemplaires ont été produits. Ce chiffre est à mettre en parallèle avec les 66 279 Ford/Mercury Capri et les 4 655 Lotus Elan produites sur la même période.
Le tableau ci-dessous liste les lancements de roadsters du milieu des années 1990 (voiture de série et concept-cars). Ils sont repris dans le même ordre dans la galerie de photos ci-dessous.
Mois/Année/Salon |
Modèle présenté |
01/1993 (Détroit) | Plymouth Prowler concept |
01/1993 (Détroit) | Porsche Boxster concept |
02/1994 (Chicago) | Mitsubishi 3000 GT Spyder ASC (avec toit rigide rétractable) – MY 1995, commercialisation en avril 1995 |
04/1994 (Turin) | Mercedes-Benz SLK concept |
10/1994 (Paris) | Alfa Romeo Spider – MY 1995, commercialisation en avril 1995 |
10/1994 (Paris) | Mercedes-Benz SLK concept (seconde version de couleur bleu) |
03/1995 (Genève) | MG F |
03/1995 (Genève) | Ferrari F50 |
03/1995 (Genève) | Fiat Barchetta |
03/1995 (Genève) | Renault Sport Spider |
03/1995 (Genève) | Rinspeed Roadster, concept sur base de Ford Mustang |
04/1995 | Ferrari F355 Spider |
09/1995 (Francfort) | Lotus Elise |
10/1995 | BMW Z3 |
10/1995 (Tokyo) | Audi TT roadster concept |
10/1995 (Tokyo) | BMW Just 4/2 concept |
10/1995 (Tokyo) | Kia KMS-II concept (dérivé de la Lotus Elan de 1989) |
MY 1996 (fin 1995) | Mitsubishi Eclipse Spyder |
01/1996 (Détroit) | Plymouth Prowler (look hot rod) |
04/1996 (Turin) | Mercedes-Benz SLK (avec toit rigide rétractable) |
07/1996 | Kia Elan (modèle jumeau de la Lotus Elan) |
10/1996 (Paris) | Porsche Boxster |
08/1999 | Audi TT roadster |
Plus d’une dizaine de modèle sont présentés en l’espace de 12 mois. L’offre explose donc. Certains modèles sont présentés bien avant leur commercialisation effective comme la Mercedes SLK (2 ans à l’avance), la Porsche Boxster (3 ans ½ à l’avance) et l’Audi TT (presque 4 ans à l’avance).
L’impulsion donnée par Mazda et sa MX-5 Miata est impressionnante par son ampleur. Pourtant vingt-six ans plus tard que reste-t-il de cette profusion de modèles.
La Mazda en est à sa quatrième génération et plus d’un million d’exemplaires produits.
À l’exception de Mercedes, les constructeurs allemands (Audi, BMW et Porsche) restent présents sur le segment. . C’est la preuve que la niche est intéressante.
En revanche, les américains ne sont jamais revenus suite à leurs échecs. La tentative de résurrection de la Ford Thunderbird au début des années 2000 n’a pas eu de suite. Le seul roadster américain disponible aujourd’hui est la Chevrolet Corvette.
Fiat, Kia, MG, Mitsubishi, Plymouth et Renault ne sont plus là. Le dernier Spider Alfa Romeo a été retiré du marché en 2010. Mais Alfa Romeo devrait revenir prochainement avec un roadster basé sur la Mazda MX-5. Affaire à suivre …
Nos fiches sont gratuites et en accès libre. Vous souhaitez partager votre passion pour une marque et/ou un véhicule et permettre aux passionnés de s’informer?
Devenez rédacteur!
Contactez-nous
Donnez-nous votre avis!
Nous adaptons nos contenus !
2 réponses
Article ma foi intéressant, j’aurais cependant deux petites corrections à apporter : Lotus était propriété de GM et non propriétaire et le Spider Alfa ne sera pas dérivé de la MX-5 ND, suite au repositionnement de la marque dans le groupe Fiat Chrysler, à sa place ce sera la résurrection de la Fiat 124
Salut Pierre,
Merci pour ta lecture avisée, j’ai corrigé l’inversion commise à savoir que Lotus était propriété de GM et non propriétaire de GM. Mais le contraire aurait pu être drôle. Cela me rappelle un papier paru dans l’Automobile Magazine dans les années 1980 qui titrait avec beaucoup d’humour que Ford était racheté par Aston Martin alors qu’il s’agissait bien sûr de l’inverse.
Concernant le futur Spider Alfa dérivé de la Mazda MX-5, c’est ce qui était encore annoncé au moment de la rédaction de l’article en mai 2015. Ce modèle futur s’est effectivement concrétisé au travers de la nouvelle Fiat 124 Spider au look réussi et se démarquant de la Mazda.